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Invité par Sam, de la matière à l’ouvrage, & Tiphaine Calmettes pour parler à la fois de mes expériences avec les tressages d’osier, & pour faire une présentation résumée de la théorie des ambiances selon le laboratoire où je travaille (JFAugoyard pour les nuls), je n’ai pu faire moins que d’y passer la semaine & demie pour mettre la main à la pâte, mettre à l’épreuve par l’action ce que j’ai appris par la science & profiter des synergies.
On est dans une dimension artistique, à la Halle, à Pont en Royan, grand village ou petite ville au nord-ouest du Vercors. Une petite place, un escalier discret qui descend vers le débouché des gorges de la Bourne. Médiathèque, galerie d’art composée de 3 pièces : un grand espace d’accueil puis 2 caves voutées, très réverbérantes, sous la place.
C’est la conjonction d’une artiste & d’un maçon d’imaginer y créer un contraste : laisser la seconde cave nue, juste la peupler de quelques œuvres/pièces de Tiphaine, l’artiste, & de complètement changer l’ambiance de la première en l'habillant de terre & de fibres.
C’est là que j’interviens : pour pouvoir revêtir de terre cette cave voutée, il y faut y greffer une armature structurelle en… osiez ? Tressages de branches végétales souples mais à la fois suffisamment solides pour supporter le poids de la terre.
Heureusement, dans les environs, des voisignes nous offrent leurs forêts de bambous envahissantes & qu’on découvre, au bout de quelques jours, la déchetterie végétale du village.
C’est fou la quantité de végétaux dont on découvre avoir besoin, surtout lorsque le projet évolue & qu’on comprend assez vite qu’on n’arrivera jamais à couvrir toute la voute avec de la terre, & que donc ces végétaux seront une bonne & plus légère alternative.
Mais il en faut foison.
Le problème c’est que ce n’est pas encore l’automne, que les sèves ne sont pas encore rentrées en terre, que les feuilles & les branches ne sont pas encore mortes, & qu’il nous faudra donc, à l’encontre de nos sagesses & de notre éthique, nous convaincre de les tuer avant leur heure.
L’art exige.
Nous sommes une vingtaine. Je ne suis qu’une des mains & des cervelles qui jouons ensemble, pensons ensemble, concevons ensemble, vivons, apprenons & réfléchissons ensemble.
Pour moi, l’apprentissage c’est d’abord la rencontre, enfin, avec une artiste plasticienne qui ose passer au-delà de l’expression de l’artiste moi-je, pour s’offrir & ouvrir la conception d’une œuvre collective, comme cela se pratique couramment en musique, au théâtre ou dans la danse.
Comme cela se pratique couramment sur les chantiers de construction, quoiqu’en pensent les architectes moi-je qui se prennent pour des artistes.
Une belle surprise lorsque, sans se concerter, juste après que j’aie mis l’accent sur une idée de J F A (l’anti-hylémorphisme, critique d’Aristote), Tiphaine a lu un passage d’un bouquin de Tim Ingold où il critique ce concept d’hylémorphisme !
Une magique improvisation vocale à 3 voix, le soir du vernissage, dans la salle 3, cave voutée à la réverbération incroyable. Personne pour enregistrer, mais 4 ou 5 personnes qui écoutaient, émerveillées & allongées dans la salle 2, admirant le plafond de feuillages & plantes en train de silencieusement & lentement mourir.
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Tout cela, bien sûr, s'inventant dans l'interaction avec les gens, le lieu et les moments…
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Le soir du vernissage, une visiteuse m'a fait ce commentaire : «…dans la première pièce (espace), on tourne autour de pièces (œuvres), dans la seconde on se retrouve soi-même à l’intérieur d’une pièce (oeuvre-espace), dans la troisième on retrouve nos habitudes, des œuvres dans un espace… »